Prendre plaisir à table, grand bonheur ou vrai danger ?
Aussi fou que cela puisse paraître, plus on prend plaisir à manger, moins on mange ! Je les entends ce qui disent « bah non, plus c’est bon, plus on en a envie, plus c’est dur de s’arrêter ».
Prenons l’exemple du chocolat…. C’est très souvent l’aliment auquel les patients font référence …
Je leur propose de m’expliquer ce qui est « si bon », ce qu’il fait qu’ils ne peuvent plus arrêter de manger.
Vous vous reconnaissez dans ces quelques lignes ? Alors cet exercice est aussi fait pour vous. Il se déroule sous forme de questions pour soi même.
- Pourquoi j’ai choisi ce chocolat et pas un autre (ou cet aliment) ?
« Je préfère le chocolat au lait en fait. Il est plus sucré, plus réconfortant, il envahit toute la bouche, la texture est fondante, … On dit que le noir est meilleur pour la santé et fait moins grossir mais je préfère quand il est au lait. » - Quand je le mange, suis-je en train de profiter de ce pourquoi je l’ai choisi ?
« Souvent, je fais autre chose, je parle avec d’autres personnes, ou je suis l’actualité, … Je ne fais ni attention au goût, ni à la texture. Et puis, je culpabilise un peu. Plus je me dis que je dois arrêter, moins j’arrête. » - Comment évolue le plaisir au cours de la prise alimentaire ?
« Je n’en ai aucune idée. Mais j’imagine qu’il baisse à un moment donné. »
En effet, lorsqu’on y est attentif, on se rend compte que le plaisir baisse à un moment donné et heureusement ! Voilà qui est rassurant. L’aliment garde toutes ses propriétés mais c’est notre appréciation qui évolue au fil du temps.
Tous nos sens vont se saturer.
Le goût devient, peu à peu, lassant, la texture écœurante, la belle présentation ne ressemble plus à ce qu’elle était, l’odeur ne nous fait plus envie et le bruit (du papier aluminium de la plaque de chocolat ou le craquement du carré qui se casse entre nos dents) ne nous fait plus saliver.
Si nous avons pris le temps, avons eu des pensées positives plutôt que des pensées négatives, notre cerveau est comblé. La prise alimentaire peut s’arrêter d’elle même.
Par pensée positive, j’entends par exemple, laisser un souvenir alimentaire agréable lié à cet aliment ressurgir. Ou encore, profiter du fondant ou du bon goût sucré dans notre gosier. Pour ce qui est des pensées négatives, ce peut être : « c’est pas bien ce que je fais », « arrête de manger, tu vas grossir », « c’est mauvais pour moi », etc…
Plus vite la satisfaction apparaît, moins nous avons besoin de manger. Il paraît inutile de manger alors que nous ne ressentons plus de plaisir (moins de 3/10 par exemple, voir graphique). Et pourtant, il est possible que cela vous arrive !
Il est tout à fait possible d’expliquer pourquoi votre courbe ne ressemble pas à l’évolution physiologique citée plus haut. Les croyances alimentaires, entre autre, modifient considérablement l’évolution du plaisir alimentaire et viennent perturber la régulation de notre comportement alimentaire. Le plaisir devient alors plus un danger qu’un allié. Heureusement, il n’est jamais trop tard pour se réconcilier avec le plaisir !
Même si cela peut paraître curieux de réfléchir autant au plaisir et à son évolution au cours d’une prise alimentaire, c’est un exercice très intéressant pour tout épicurien ou personne désireuse de réguler son poids. Les avantages sont multiples: meilleure digestion, quantités adaptées, et surtout prise de plaisir, écoute de soi et sérénité.
Vous savez désormais que le plaisir n’est pas illimité. Sa diminution est d’ailleurs appelée le RASSASIEMENT, mot que l’on utilise pas toujours à bon escient. Nous confondons souvent rassasiement et satiété. Cette dernière marque juste l’arrêt de la faim. En général, notre ventre ne crie plus famine, nous sommes à satiété, c’est notre tête qui en réclame encore un peu. A vous maintenant, de faire apparaître le rassasiement au bon moment, pas trop tôt pour ne pas être frustré, pas trop tard pour ne pas avoir mal au ventre.
Bonnes dégustations à tous.